TIAD 2016 : Les outils de la désautomatisation

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Du fait de l’automatisation et la robotisation des activités il existe de moins en moins d’espaces pour un conformiste qui n’apporte pas d’autre valeur ajoutée sinon celle d’obéir correctement à un certain ordonnancement des êtres et des choses- Michel Saloff Coste.

Nous évoquions dans un précédent article l’importance de la désautomatisation : la nôtre ! Nous sommes pour la plupart d’entre nous sous l’emprise d’un certain nombre d’automatismes qui brident notre capacité à créer du nouveau. Nous savons que nous devons faire évoluer nos organisations (entreprises, collectivités …), que nous devons travailler différemment mais, pour des raisons qui nous échappent, nous reproduisons les mêmes schémas, et donc les mêmes résultats.

We collectively create results that no one wants – Otto Sharmer

Ces dysfonctionnement s’expliquent en grande partie par le fait que nous travaillons avec des automatismes acquis dans d’autres contextes et qui ne sont plus du tout valides aujourd’hui, tant les enjeux sont différents voire parfois entièrement nouveaux.

Alors comment fait-on concrètement pour se désautomatiser ?

Éclairer l’angle mort des organisations

Au MIT, Otto Sharmer, s’est intéressé à la question de la désautomatisation à travers ce qu’il appelle l’angle mort – le blind spot – des organisations (mais aussi des personnes). Cet angle mort est le lieu à partir duquel nous opérons : de ce lieu découlent nos actes et décisions. Bien souvent cette zone est aveugle et remplie de croyances que nous ne questionnons pas tant nous les considérons comme des évidences.

Par exemple, pour beaucoup de managers, il est indispensable de mettre en place des procédures de contrôle à tous les niveaux car les personnes ont besoin d’être contrôlées. On ne peut pas faire confiance. C’est une évidence non discutable pour certains.

Parfois nous ne savons même pas que c’est une croyance tellement cette pensée relève du lieu commun. Combien de personnes et organisations pensent que la compétition est inhérente à l’homme et que mettre les personnes en concurrence est la meilleure façon d’obtenir des résultats (alors qu’un grand nombre d’études prouvent le contraire) ?

Étonnamment, nous nous intéressons aux faits, aux choses, parfois aux personnes mais rarement au “lieu-source” de nos décisions, à notre grille de lecture. Pourtant, de cette zone découle tous les choix que nous faisons.

Une approche de la désautomatisation : la théorie en U

Otto Sharmer et son équipe du MIT ont alors élaboré une approche pour faire évoluer en profondeur les organisations : la théorie en U.

Applicable aussi bien à un petit groupe de personnes qu’à une grande organisation, cette approche nous incite à dépasser ce qu’il appelle « le téléchargement de données », afin d’entrer dans un cycle de désautomatisation. Le téléchargement de données consiste à ne prendre en compte que ce que nous connaissons déjà. Nous allons chercher dans la réalité uniquement les faits qui corroborent nos croyances et nous excluons ceux qui les contredisent. Nous sommes ainsi confortés dans notre façon de voir les choses, rendant les évolutions toujours plus compliquées.

Au contraire, la théorie en U nous invite à écouter tous les faits – même ceux qui contredisent nos croyances (Open Mind), pratiquer une écoute empathique (Open Heart) et enfin une écoute dite “générative” (Open Will) pour laisser notre créativité et nos idées (et intuitions) émerger.

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Pour en savoir plus sur la théorie en U : livre, MOOC.

Aller chercher ce qui est différent et l’expérimenter

Se désautomatiser commence donc par aller chercher des faits et des personnes ayant des approches différentes des vôtres, sans les juger à priori. Il ne faut pas se limiter à son domaine, mais au contraire s’intéresser à d’autres métiers, de l’IT au management, du recrutement aux achats… Il faut chercher l’altérité, des avis divergents, variés, avec des gens différents qui vont bousculer et ouvrir d’autres champs des possibles.

Et après? Il faut se permettre d’expérimenter (au sens de faire l’expérience), se ménager des espaces d’expérimentation, sur une heure, sur une journée, tester une autre façon de faire et d’aborder les choses. C’est par l’expérimentation de nouvelles façons de faire, abordées avec un regard neuf, que l’on peut envisager d’abandonner certains de ses automatismes. Cette expérimentation peut prendre de nombreuses formes : des journées de découverte, des rencontres, des sessions de travail atypiques ou des lectures inhabituelles .

“Updating the Operating Code of Our Systems”

Avoir fait l’expérience de la nouveauté permet de la rendre “accessible”. Mais comment l’intégrer dans notre entreprise ? Il ne s’agit évidemment pas de changer l’ensemble de ses méthodes de travail du jour au lendemain. Pour expérimenter à plus grande échelle, on peut essayer mettre en pratique les idées et enseignements issus de l’étape précédente sur l’un de ses projets, sur lequel on peut essayer d’introduire une nouvelle façon de faire. La désautomatisation est un travail individuel, mais aussi collectif, qui suppose de comprendre, et surtout d’accepter, que l’évolution est partie prenante du fonctionnement d’une organisation. On peut aussi s’inspirer de la culture du prototype, afin d’intégrer de nouvelles pratiques sans pression productiviste. Affiner et rendre efficientes de nouvelles méthodes de travail demande en effet du temps : il y a forcément une courbe d’apprentissage et des tâtonnements.

Constituer sa boîte à outils de désautomatisation

Comme nous le disions plus haut, se désautomatiser n’a rien de trivial : il n’y a pas de formule magique, ni de parcours pré-déterminé, qui nous amènerait à remplacer un automatisme par un autre. C’est à chacun d’entre nous de construire ses propres outils de désautomatisation, de construire en quelque sorte sa boîte à outils, en choisissant les plus adaptés. Nous avons évoqué ici certaines méthodes, attitudes, et l’importance de l’expérimentation : maintenant, à vous de jouer pour vous construire un nouvel avenir !

Automatisation et Désautomatisation, mais aussi Big Data, Cloud, DevOps, IoT… tous ces sujets seront abordés lors du TIAD 2016. Rejoignez-nous !

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