API Days : retour sur le Sustainable Digital Challenge 2023

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En décembre 2023, Devoteam Revolve était Premium Partner du Sustainable Digital Challenge. Pour les entreprises participantes, l’objectif est de présenter un produit numérique plus responsable après 3 mois de travail. Un véritable challenge pour ces équipes ! Le challenge s’est clôturé par une présentation aux APIdays de Paris, durant la conférence GreenIO.

Comprendre les enjeux, techniques ou fonctionnels, de la sobriété

Depuis 6 ans Devoteam Revolve accompagne le Challenge Sobriété Numérique APIDays. Le but est que les équipes participantes proposent d’améliorer un de leurs produits numériques, afin de le rendre plus sobre. Cette année, 10 équipes d’entreprises différentes ont participé. Elles sont accompagnées par des mentors qui peuvent être d’anciens participants au challenge, ou bien faire partie d’entreprises engagées dans le numérique responsable.

Le challenge dure 3 mois, avec tout d’abord l’attribution des mentors. Vient ensuite le premier atelier, qui s’adresse à tous les porteurs du produit, techniques et non techniques. Les informations fournies aux participants sont très concrètes et leur permettent réellement d’optimiser leur produit afin de diminuer son impact écologique.

Du côté de la technique il y a des bonnes pratiques d’écoconception avec par exemple des extensions de navigateurs web comme NumEcoDiag ou EcoIndex qui permettent de mesurer l’impact carbone d’un site ou bien encore les 115 bonnes pratiques d’écoconception disponibles sur le repo Github Cnumr.

Du côté moins technique, il y a la présentation de la loi Reen (Réduire l’Empreinte Environnementale du Numérique) dont une évolution arrivera en janvier 2024 afin de contraindre davantage les impacts du numérique. L’objectif principal étant de se poser la question si une page ou une fonctionnalité est réellement nécessaire ou pas.

De plus, on sait que le principal impact du numérique est dû aux terminaux des utilisateurs, donc forcer à l’obsolescence de ces terminaux avec des sites nécessitant de plus en plus de puissance et les dernières fonctionnalités à la mode n’est pas une pratique en faveur du numérique responsable.

L’impact carbone des infrastructures Cloud

Le second atelier est axé sur l’infra à travers des présentations aux participants d’intervenants de GCP, AWS et The Green Companion afin de comprendre le vocabulaire de l’impact carbone et les stratégies des fournisseurs de services cloud (Cloud Services Providers, CSP), que les participants utilisent. 

The Green Companion

La présentation de Benoît Petit (The Green Companion) est sans concession et a le mérite de faire la distinction entre le green washing du secteur et les métriques qu’il faut suivre.

Par exemple dans le scope 2, dont l’objectif est de mesurer l’impact carbone de l’électricité utilisée, si le fournisseur parle de l’intensité carbone de son fournisseur d’électricité, la mesure sera pertinente si elle est “location based” et non “market based”. En effet la première est sur une origine concrète d’électrons, par exemple le fournisseur s’engage à ce que l’électricité provienne d’un mix de parc éoliens/solaires. Par contre la deuxième n’est qu’une ligne sur un contrat garantissant que sur l’ensemble de la production d’une période (un jour, un mois ou une année), elle est donc sans réalité physique puisqu’on raisonne sur des bilans comptables, et pas sur des origines concrètes.

Également, il est question de la neutralité carbone des entreprises : ce n’est physiquement pas possible et elle ne peut pas être calculée par entreprise. Au contraire, elle doit être considérée globalement puisqu’une entreprise n’est pas isolée mais insérée dans un écosystème dont elle dépend. Il existe également des outils afin de mesurer son impact carbone qui se concentrent principalement sur le scope 2 (les scopes 1 et 3 étant principalement déclaratifs) : Cloud Carbon Footprint, Kepler, CodeCarbon, Boavizta API

Google Cloud Platform

La présentation de Vincent Poncet revient sur l’engagement de plus de 20 ans de Google en faveur de l’optimisation écologique de ses infrastructures. Il s’agit non seulement de l’optimisation de l’émission des gaz à effets de serre, mais aussi du cycle de l’eau, ou du cycle de vie des équipements des datacenters.

Il présente également l’impact des différents services : plus un service est managé plus celui-ci peut être optimisé. Mais il ne faut pas oublier que même avec du matériel très optimisé, le principal levier pour changer son impact carbone est de changer ses usages, et donc d’utiliser des services du CSP qui sont le plus adaptés au besoin.

Et AWS ?

La présentation de Philippe Desmaison débute sur l’effet rebond : attention au piège où l’on optimise l’impact écologique du numérique pour en décupler les usages, en annulant par là même les optimisations faites.

Par exemple, le stockage sur S3 de fichiers est bien moins cher par rapport à un stockage sur disque. Cela peut amener à un data lake de plusieurs peta, avec des données qui ne serviront jamais, ou qui sont trop vieilles, ce qui conduit à avoir une utilisation du service bien plus importante que ce qu’elle devrait être. Même si AWS est moins avancé que Google sur la présentation de son engagement climatique les messages sont similaires : ce sont les usages que les clients font du cloud qui permettent d’optimiser au mieux.

Il ne faut également pas perdre de vue qu’il y a les mesures liées à l’infra (CPU, RAM, réseau, …) et les autres (coût, vitesse, disponibilité, qualité, …). Ce n’est pas en se concentrant sur l’infra que l’on optimise un produit mais en considérant un ensemble : cela veut souvent dire qu’il faut repenser son produit afin de le retravailler. La sobriété numérique est un pilier de bonne architecture pour AWS, il faut trouver le bon équilibre entre chacun de ces piliers, il ne faut pas l’oublier.

La table ronde qui a suivi a permis d’approfondir les optimisations qu’AWS et Google mettent en place. Nous avons également fait un focus sur l’outil Cloud Carbon Footprint qui permet de mesurer l’impact carbone à partir de la consommation des services des CSP.

Le challenge s’est terminé lors du la conférence Green IO hébergée au API days de Paris le 8 décembre 2023. Les équipes ont montré différents niveaux de maturité sur la mise en place de la sobriété numérique, car certaines entreprises participent au challenge plusieurs fois. Ce qui est certain est quel que soit le niveau des équipes avant le challenge, toutes ont progressé dans leur réflexion de mise en place d’un numérique responsable. 

Les enseignements de ce challenge

Les 3 premières places ont été remportées par Ekwateur, Groupama et la SNCF, avec des prix spéciaux pour l’INSEE, Blablacar et Leboncoin. Les points communs de ce trio de tête sont :

  • La formation afin de sensibiliser tous les collaborateurs à ces enjeux. Penser que la sobriété numérique est un challenge uniquement pour la DSI est une erreur, c’est un défi pour l’entreprise toute entière car il faut qu’elle change ses usages, comme par exemple éteindre des éléments de hors production la nuit, ou simplifier le parcours utilisateur sur un site web.
  • La réflexion sur les contenus exposés sur les sites web : pour alléger les pages il faut évaluer la plus value des éléments qui y sont présents. Plus un élément est gros, plus il va consommer des ressources aussi bien côté serveur que côté client. Ainsi il faut se demander si une bannière animée est pertinente, si une vidéo est réellement utile aux utilisateurs, si une image apporte de l’information ou une meilleure expérience. Des sujets purement techniques demeurent cependant : minifier les codes (html, css, javascript) en enlevant tous les caractères inutiles comme les retours à la ligne, les indentations, les commentaires, ou ne pas charger une librairie juste parce que tel développeur aime bien telle fonction…

Certains points ont permis de faire la distinction entre les équipes :

  • La prise en compte des terminaux anciens : pour lutter contre l’obsolescence programmée il faut que les ressources d’une entreprise soient accessibles à partir de “vieux” navigateurs qui n’ont pas les dernières technologies, ou bien qui ne nécessitent pas une quantité importante de mémoire ou de CPU
  • Refonte de la page la plus visitée de l’entreprise, généralement la page d’accueil. Cela présente un double avantage : les utilisateurs peuvent l’afficher plus rapidement, et les gains sur les performances sont facilement mesurables avec des statistiques fiables
  • La mise en place des pratiques d’écoconception pour le front web avec une chaîne de CI/CD fournissant les métriques sur l’activité d’un utilisateur. En effet, les utilisateurs représentent le plus gros impact, il est important de le mesurer et de le limiter.

Le Challenge 2024 est ouvert, si vous souhaitez sensibiliser vos équipes sur le thème de la sobriété numérique. On a hâte de voir les idées de ces futures équipes dans la mise en place d’un numérique plus responsable.

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